mardi 25 mars 2014

Fidéline Dujeu ou la femme qui…



Fidéline Dujeu ou la femme qui…


Manon Fourez

C’est un bel après-midi que nos chemins se sont croisés. Avec  un sourire rassurant,  Fidéline accueille ses jeunes journalistes, débordant de questions. Cette femme est  si naturelle que l’on ne  se doute pas  qu’elle soit écrivaine ! Et pourtant, c’est le cas. D’une écriture qui lui ressemble et d’un langage familier, Fidéline nous reçoit, non pas en talons aiguilles et habillée d’un tailleur Chanel ! Mais c’est avec  un bête jeans noir et  un pull, qu’elle a accepté de répondre à certaines interrogations. Avant, quelques petits renseignements à prendre en compte  pour une meilleure lecture et pour mieux connaitre Fidéline Dujeu, cette femme si.




Fidéline
Fidéline Dujeu est une romancière belge, mère de quatre enfants. De ce fait, elle sait comment faire réagir des adolescents, rien qu’en écrivant. Avec une âme de solitaire endurcie, elle reste naturelle et très ouverte à chaque type de sujet. Malgré cette époque très dure, Fidéline continue à sourire à la vie, à sa vie et combat tous les problèmes qui viennent déranger sa voie. Elle a une personnalité bien à elle qui donne envie de la connaitre de plus en plus. Comme une particularité que tous peuvent remarquer quand elle parle ou dans ses écrits, Fidéline ne finit jamais ses phrases et ce fait, nous le faisons tous mais elle, elle le revendique et cela fait partie d’elle, une partie « d’authenticité »  envers elle-même et ses lecteurs. Fidéline a écrit quelques romans du genre, comme je pourrais appelerRéalité fictive. C’est-à-dire  une réalité, que tous peuvent subir avec des faits tout à fait possibles mais en imaginant les personnages. Fidéline s’inspire un peu de son histoire, son expérience, son entourage pour écrire mais tout ça mélangé avec une part de fiction.


Un air de famille
Son roman Guère d’homme est raconté par deux personnages, liés par le sang. L’une,Marie-Rose, l’héroïne principale, la grand-mère, le modèle à ne pas suivre ; l’autre, la petite-fille qui apprend des erreurs de son aïeule, elle ne veut pas faire les mêmes fautes qu’elle. Ici, la petite fille est un peu Fidéline et Marie-Rose, sa grand-mère dont elle ignorait sa vie durant l’absence de son mari en 40/45. Pendant ces cinq années-là, notre auteur n’avait aucune idée de ce que sa grand-mère menait comme vie. Elle s’est donc renseignée et a créé une autre grand-mère qui aurait pu être la sienne. Elle crée Marie-Rose, une grand-mère fictive, lui donne une personnalité et un destin tout au long du roman. Et au fil des pages, les frissons arrivent et l’émotion accélère, de plus en plus forte.  Les relations amoureuses des femmes de sa famille ont toutes été longues. Elles ont  toutes  attendu. Attendre mais forcément être déçue à la fin. Et Fidéline a aussi cette impression d’attendre car «  Nous sommes tous liés à nos ancêtres ».


Temps à la création
Écrire un roman, cela prend du temps et de la réflexion. Il faut se concentrer et former une base dans sa tête et ensuite, écrire tout ça. Cette structure est la base de l’histoire, son arbre généalogique. Parfois, il se peut que cela soit très clair pour l’auteur mais pas toujours pour le lecteur qui doit déchiffrer. Ce qui est quelque fois le cas de Fidéline Dujeu. Alors, pour mieux faire passer le message, elle nous laisse derrière elle des indices qui permette une meilleure compréhension mais sans tout recevoir sur un plateau. Elle ne nous révèle pas tout d’une fois ! En outre, la création d’un roman ne suffit pas qu’à inventer une histoire et la retaper. Il faut aussi des personnages et découvrir leurs personnalités. Dans  Guère d’homme, Fidéline progresse avec Marie-Rose mais elle ne sait pas à l’avance sa destinée. Elle ne la connait qu’à la fin de l’histoire. Et Fidéline ne se doutait pas au début de sa rédaction que la fin serait tragique.  C’est ce côté si attrayant du métier d’écrivain : on construit la vie, la situation d’un personnage. On vit avec lui pendant quelques temps, comme si c’était un ami. On passe ses journées, ses soirées avec lui. Sans savoir quand et comment sa vie s’arrêtera...

Les histoires sur commande
Fidéline  Dujeu a également écrit des nouvelles sur commande dont  Les nuages ne sont pasroses  pour la communauté française où elle devait atteindre un public de type adolescent. Ou aussi,  Au trois verds chapeaux, pour la ville de Mons. Là, son but était de se balader une journée dans la ville et écrire. Plutôt pas mal comme journée !


Écrire en atelier
Aujourd’hui, Fidéline se consacre à des ateliers d’écriture. Elle a des ateliers de différents types : littérature, récit de vie et projets. Les ateliers de récit de vie consiste, pour les gens qui y vont, à raconter par écrit leurs histoires, leurs vies, leursbiographies. Les personnes qui choisissent plutôt la littérature sont là pour tout simplement écrire des romans de tous types. Les projets demandent plus de travail puisque se sont de plus lourds dossiers à réaliser tel que des recueils de poésie, des pièces de théâtre, … Fidéline travaille avec des personnes qui veulent écrire mais qui ne trouvent pas toujours le temps de le faire. Elle leur donne un petit coup de pouce en apportant des objets extérieurs (peinture, image, tableau, …) pour que l’inspiration arrive aux écrivains en herbe. Les personnes qui y participent ont envie d’écrire. On peut tous écrire ce que l’on veut. « L’écriture exprime quelque chose » affirme-t-elle.

En fait, Fidéline Dujeu est une femme à connaître. Très ouverte et active, elle n’a pas peur de dire les choses ! Elle a de la générosité à revendre. Elle passe la plupart de son temps à aider les autres dans un domaine qui lui va à ravir : l’écriture. Et le plus important, c’est que Fidéline vous donne confiance durant ce processus (ou vous la rend quand vous l’a perdu dans vos doutes) : « Quand on commence à écrire un livre, il faut y croire ! »




Interview de Fidéline Dujeu

Manon Fourez : Pour  Guère d’homme, est-ce vous avez écrit les deux narrations (c’est-à-dire celle de Marie-Rose et celle de la petite fille) séparément ou tout imbriqué ?

Fidéline Dujeu : J’ai tout imbriqué directement. Et à un moment, je me suis rendu compte que c’était difficile à suivre et donc, c’est pour ça que j’ai mis les parties en italique. Au début, je me suis rendu compte que dans ma tête, c’était clair ; mais que pour le lecteur, ça ne l’était pas forcément. J’avais cette impression de donner trop de clés au lecteur en le mettant en italiques… mais c’est mieux !  Il y a des écrivains qui donnent beaucoup et d’autres qui n’en donnent pas beaucoup. Moi, j’essaie d’être entre les deux mais parfois, j’en donne peu aussi, pour qu’ainsi le lecteur puisse réfléchir.   

M.F. : Comment écrivez-vous ?

F.D : Je n’ai pas beaucoup de temps dans ma vie d’écrire. Donc, quand je commence à écrire, j’ai déjà bien travaillé dans ma tête. En général, je n’écris pas de trop. Je sais ce que j’ai à dire et donc, je ne perds pas trop dans l’écriture. Il y a parfois des personnes qui écrivent dix pages et puis finalement, on a retient que deux ou trois. Moi, tout ce travail d’élagage, je le fais dans ma tête, mais alors après, de nouveau comme je n’ai pas beaucoup le temps, quand j’écris un roman, ça me prend du temps. Je le laisse de côté pendant quelques jours, voire quelques semaines,  je reprends le roman et puis, j’élimine encore. Plus que je relis, plus que je retire. En général, mon éditeur me demande d’ajouter mais c’est plus difficile en fait ! (Rires)

M.F. : Vous avez un moment bien précis dans la journée pour écrire ?

F.D : Alors ce que je préfère, c’est le matin quand je suis toute seule chez moi. Mais c’est très rare ! (rires) Je fais en fonction des moments. Mais je trouve, moi, que j’écris mieux le matin … Pas tôt ! Parce que je ne suis pas une lève tôt mais entre 10h/13h. Là c’est parfait ! Si je pourrais avoir ce temps-là tous les jours, peut-être que j’aurai des romans de 300 pages et pas de 100 pages !

M.F. : Dans Guère d’homme, les personnages sont dépendent des hommes. Les femmes ne sont pas libres. Pourquoi ?

F.D : encore aujourd’hui, si on pense que les femmes sont égales des hommes et qu’on a autant de liberté, je ne pense pas. Même dans la société aujourd’hui. Mais c’est aussi à cause de nous, parce qu’on se laisse pas parfois être libre. Quand on voit des histoires des femmes qui ne sortent pas de chez elle parce que leurs maris ne veulent pas, c’est elles aussi qui décident d’obéir. Et donc, dans le livre, elle n’est pas libre (Marie-Rose), même si elle pourrait se libérer.

M.F. : Comment a fonctionné l’histoire sur Mons ? Était-ce une contrainte d’écrire ?
F.D : C’était vraiment très gai de travailler sur ce projet à Mons à partir des chapeaux (de bâtiments de la ville). Et donc, non, ce n’était pas une contrainte. Je me suis dit : «  Ah chouette ! Mon travail aujourd’hui, c’est d’aller à Mons. Une journée toute seule ! » C’est super gai... Enfin, personnellement, j’aime beaucoup être toute seule et aller me promener. Et donc, j’ai fait ça à Mons et l’histoire s’est construite. Mais, oui, j’aimais vraiment bien… c’était un peu comme des vacances ! (rires)


 Bibliographie

Aux éditions «  Le Somnambule équivoque »

2004 – Coquillages
2005 – L’île Berceau
2007 – Guère d’homme
2010 – Angie
Aux éditions Tanden
2008 – Petit Tom et l’embrouillamini
Les commandes
2008 – Au trois verds chapeaux

2013 – Les nuages ne sont pas roses